Le bandit mexicain et le cochon by James Crumley

Le bandit mexicain et le cochon by James Crumley

Auteur:James Crumley [Crumley, James]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature américaine, Nouvelles, Policier
ISBN: 9782070316205
Google: 1SSXPQAACAAJ
Éditeur: Gallimard - Série Noire
Publié: 1999-03-14T23:00:00+00:00


Titre original :

an ideal son for the jenkins family

Traduit de l’américain

par Jean Esch

The Muddy Fork

« Si tu dois y retourner, retournes-y en novembre, porté par les ailes bleues d’un vent du nord… »

Ainsi que le répétait Galen Moody. Parfois comme s’il s’agissait d’une supplication et que novembre était le mois le plus sûr au Sud Texas, parfois avec un juron – « retournes-y, bon Dieu, retournes-y » – et un jour où on était en pleine descente d’acide et qu’on chassait le serpent à sonnette dans l’est du Colorado, il prononça ces mots avec des larmes coulant sur son large visage, agitant ses mains de géant devant lui. « Si tu dois… si tu dois… revenir », avant de pleurer dans ses mains.

Le problème, c’est que Galen n’avait pas passé un seul mois de novembre à la maison depuis notre dernière année au lycée. Il y passait tous ses étés, tétant le sein généreux de son père, mais dès septembre, il repartait. Dès juin, il était fauché et de retour. Contrairement à Pancho, qui n’était jamais parti, contrairement à moi, qui étais resté absent presque vingt ans, contrairement à Maudie qui revenait quand ça lui plaisait, Galen revenait toujours, tel un boomerang docile, il prenait l’argent, et il le dépensait. Mais, malgré ses dires, jamais en novembre.

Nous ne sommes pas en novembre, mais en mars, et me voilà de retour ici pour la seconde fois en moins d’un an, et tout le monde est parti. La Grande Maison se dresse, solitaire et vide à part moi, au sommet d’une petite colline au sud de la Muddy Fork des Nueces, tel un monument aux morts oublié. Au moins y avait-il un vent du nord ce matin, mon premier matin depuis mon retour. Galen aurait peut-être aimé ça.

Juste après minuit, le vent du Golfe mourut, humide et chaud, sur mon visage, puis l’atmosphère se remplit et frissonna de brume, tandis que le front froid comprimait l’humidité qui le précédait. Le belvédère et le vieux fauteuil de toile sur lequel j’attendais étaient couverts d’une forte rosée, humides au point de goutter. Juste avant le lever du jour, mais après les premières lueurs, les premières rafales glacées murmurèrent à travers le pare-vent de cèdre dans un glissement de feuilles de soucis d’eau squameuses, et l’unique coq nain s’en alla, l’aile pendante à la suite d’une rencontre avec un coyote ou un renard, poussa son chant vers le ciel terne, avant de se le faire arracher du bec quand le vent prit de la force. Le moulin abandonné se retourna en grinçant pour braver le vent, faisant hurler ses engrenages enroués, tandis que les ailes se mettaient à tournoyer et la tige brisée à pomper l’air. Sous les arches espagnoles en face de la véranda, des plantes grimpantes délaissées dans des pots suspendus oscillaient et bruissaient comme des danseurs sur une promenade spectrale. Une salve de gouttes de pluie froides s’écrasa contre les murs de plâtre écaillés, laissant des taches semblables à des larmes sur les pages d’un vieux livre, puis s’arrêta.



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